MOKHTAR SALAMATE
Depuis la fin du 18ème siècle, la norme en science politique est l’État-nation. Un État souverain, un peuple identifiable, dans un territoire légitime et une histoire reconnue. C’est à cette aune qu’il exerce sa souveraineté, sa défense, ses missions de politiques étrangères et qu’il occupe sa juste place dans le concert nation.
Soyons plus précis, regardons la définition la plus simple ! « Un État-nation est un concept qui juxtapose une notion d’ordre identitaire, la nation (c’est-à-dire des individus qui se considèrent liés entre eux) et une notion d’ordre juridique, l’État (en tant qu‘organisation politique) ». Sur ces deux points fondamentaux constitutifs on constate des vulnérabilités sérieuses en Algérie.
Une légitimité militaire — celle d’un clan contre les autres — dopée par un récit national largement « trafiqué » n’a pas pu supplanter les autres légitimités : historique, démocratique, territoriale, culturelle… nécessaires à la construction d’une nation unie, au destin lié et à l’identité forte riche de ses affluents et de ses différences. On peut faire « Armée » — ou à la limite « État autoritaire » — mais cela ne fait pas forcément « Nation ». Il est là le fond du problème.
Depuis son indépendance en 1962 de la France, l’État algérien, qui n’existe pas avant la colonisation ni en tant qu’entité, ni en tant qu’appellation, court après les attributs de l’Etat-nation qu’il n’arrive pas encore à cristalliser ni en tant nation à l’abri des forces centripètes du séparatisme (exemple en Kabylie), ni en tant que territoire sécurisé par la consolidation du temps.
L’État militaire qui a préempté l’indépendance algérienne en installant un régime de prédation économique et de confiscation des libertés publiques, scandé épisodiquement par des éliminations physiques de ses opposants, n’a pas réussi, on le répète, à faire Nation. C’est cela son plus grand échec.
Même en tenant « goulument » les deux mamelles de la logorrhée tiers-mondiste : l’intangibilité des frontières héritées du colonialisme et le droit à l’autodétermination des peuples, il n’a pas réussi à « blanchir » ses territoires indus offerts par la France coloniale ni à priver le Maroc du 1/3 de territoire en mettant en avant un peuple inventé de toutes pièces, le peuple sahraoui en l’occurrence, et un territoire national imaginaire au détriment de la souveraineté historique du royaume du Maroc sur ses provinces du Sud.
Le fail state
En fait, c’est l’histoire ridicule d’un « fail state » qui entend créer ex-nihilo un « no-state » en préjugeant de son poids géopolitique, de sa posture régionale et de sa capacité zélée à prendre ses lubies pour des réalités tangibles. On ne peut pas donner ce que l’on n’a pas, autrement dit l’arbre mort ne peut donner refuge.
Comme la réalité est têtue et que les données géopolitiques sont obstinées, le pouvoir algérien, mis de lui-même dans une impasse historique avec aucune lumière au bout, a commencé à recourir à une arme, interne et externe, de destruction massive qu’est le mensonge. Mentir, mentir constamment, il en restera toujours quelque chose tel que cela a été théorisé par Joseph Goebbels !
Le mensonge de face, sans sourciller, sans retenue, colérique, sans pudeur, sans frein, pitoyable, pleurnichard qui entend faire plier la réalité à ses phantasmes.
Près de 200 communiqués d’une guerre factice repris par des médias aux ordres. Fausses informations, fausses images, faux bilans etc. Une guerre dont le théâtre des opérations est l’imaginaire de généraux perdus, en déroute.
Mensonges sur la situation économique de l’Algérie avec un appareil statistique complètement dévoyé que seul une réalité sordide arrive à éclairer. Tous les médias publics relaient cette mélodie du bonheur au détriment du vécu d’une population qui supporte les affres des privations, des pénuries, de la violence d’Etat, des dérégulations criminelles du marché etc.
On passe sur le reste : la situation des collectivités territoriales essorées, le terrorisme résiduel, les monopoles, les rentes, l’état réel de l’armée, la situation à Tindouf, le bilan réel du Covid, le nombre de réfugiés, les réserves de gaz, celles des devises etc. Tout est mensonge.
Que l’État algérien en soit réduit à mentir, tous les jours, pour exister est l’expression la plus absolue du désarroi dans lequel se trouve ces généraux finissants avec, au bout de leurs vieilles ficelles, un pantin civil qui ne fera jamais l’affaire.
La science politique vient de s’enrichir d’un nouveau concept que le professeur Manar Slimi, bien inspiré, a nommé récemment : l’État-menteur. C’est une catégorie d’Etat à laquelle il va falloir s’habituer dans le sillage historique, de ses ancêtres de l’État stalinien, nazi, mussolinien, polpotien etc. La galerie cauchemardesque de l’Histoire en est pleine.
C’est un État qui tourne le dos à la réalité qu’il refuse de voir. Il déguise ses échecs, ses performances ratées, ses fautes, ses insuffisances, ses tâtonnements, ses faillites en victoires que sa machine de propagande s’empresse de relayer même si tout cela, d’un jour sur l’autre, est plutôt contradictoire.
Rien n’échappe aux chancelleries étrangères qui suivent cela avec beaucoup de pitié et de compassion pour une pauvre Algérie prise ne otage, violée, abimée et détruite par des généraux sanguinaires, sans foi ni loi.
Mais chacun, chaque pays réagit en fonction des intérêts propres qu’il entend faire prospérer en profitant de cette faillite universelle ! Il est fou celui croit que les généraux d’Alger feront cas, le moment venu, des 40 000 réfugiés de Tindouf alors qu’ils ont écrasé dans une guerre civile abjecte plus de 200 000 de leurs compatriotes sans coup férir sans remords et sans, absolument, aucune miséricorde.
Un seul message désormais pour le séquestrés de Tindouf. Cet État-menteur est dément. Il finira par vous anéantir. « Fuyez donc vers Allah. Moi, je suis pour vous de Sa part, un avertisseur explicite.» (Coran 51-50.
المصدرCHAINE ALARABETV