Kaddour Fattoumi
« L’art du Malhoun dans tous ses états » est le thème de la 19è causerie du patrimoine organisée virtuellement par la Fondation Maroc du Patrimoine et animée par M. Fouad Guessous, chercheur influent dans le patrimoine musical marocain.
Le conférencier, auteur en langue française de « Anthologie de la poésie du Malhoun Marocain », a affirmé que la poésie du Malhoun est « fabuleuse, magique et euphorique » et constitue sûrement « l’expression la plus brillante du génie marocain » bien que cet art ancestral a été un peu négligé et oublié .
Paru il y a plus de cinq siècles et comptant quelque 5.000 Qassidass, le Malhoun marocain a d’ abord fait son apparition dans le sud du Maroc (Sijilmassa ou Tafilalet) avant de se développer dans plusieurs cités du royaume, notamment à Er-Rachidia , Fès, Marrakech, Meknès, Salé et Taroudant. Cet art ancestral a connu des périodes d’apogée mais aussi de léthargie, a-t-il indiqué, notant, toutefois, qu’un regain d’intérêt s’est manifesté pour ce riche art civilisationnel avec des pétitions pour sa reconnaissance par l’UNESCO comme « patrimoine immatériel de l’humanité » .
Le conférencier a rappelé quelques auteurs et ténors emblématiques de la poésie du Malhoun dont le Sultan Mohammed Ben Abderrahman (1859-1873), Mohammed Benslimane , auteur de « Zine El Fassi » (beauté fassie), Driss Benali compositeur du poème « Chemaa » (bougie) et Sidi Kaddour Alami, auteur de « Kif Iwassi ?» (Comment faire) et bien d’autres chioukhs comme Sidi Omar El Yousfi, Jilali Amtirid etc..
Les thèmes du Malhoun sont aussi divers que variés, tels l’amour de Dieu et du prophète, la nature, l’amour et la beauté de la femme, la politique et la vie quotidienne dans ses scènes burlesques, a-t-il assuré.
La poésie mystique occupe une place privilégiée dans l’art du Malhoun , dont « Mani Fiyach » (De quoi me plains –je ?), Qassida de prédilection appelée « Al Fiyachia » du poète marocain Sidi Yahia Cherki et qui connait un succès phénoménal dans les fêtes traditionnelles et religieuses, a-t-il signalé .
Et de poursuivre que plusieurs Qassidas magnifient les noms de la femme et leur beauté, tels Ghita, Fatma, Nezha du poète Driss Benali, voire du burlesque comme les disputes entre « Guedra et la cocotte minute », « le thé et le café ».
En politique, le poème de « l’abeille » du barde Thami El Mdaghri a été chanté et rendu célèbre par le groupe mythique de Nass Al Ghiwane, a-t-il ajouté , soulignant que le Malhoun est aussi un domaine de prédilection pour le théâtre dont « Harraz d’Aouicha » de Mekki Belkorchi , poème à succès adapté en 1960 par le dramaturge disparu Tayeb Saddiki dont les passages lyriques ont été interprétés par des acteurs qui ont formé au début des années 70 les groupes mythiques Nass Al Ghiwane et Jila Jilala.
Le conférencier Fouad Guessous s’est enorgueilli qu’une maison d’édition française lui a demandé sa permission de publier deux poèmes du Malhoun traduits « Chemaa » (Bougie » et « An-Nahla » (l’abeille) dans un livre de la 4e année secondaire , rappelant que sa publication de « Anthologie de la poésie du Malhoun marocain » avait pour principal objectif de faire connaitre aux francophones du Maghreb et de l’Europe , ce riche patrimoine civilisationnel , culturel et artistique marocain.
Le Dr Abdelfettah Sabai, directeur des causeries du patrimoine a précisé, à cette occasion, “dans ses traductions judicieuses et délicieuses, M. Fouad Guessous nous transmet dans la langue de Molière, la sensibilité, la poésie, les métaphores, les allitérations et autres figures de style littéraire, déclamées dans les Qassidas du Malhoun, avec un dialectal marocain raffiné, hérité de la rhétorique de Sibawayh » .
Natif de Casablanca en 1941, Fouad Guessous a étudié au Lycée Lyautey avant d’obtenir à Paris , une licence en droit et un diplôme de Sciences-Po. Cadre supérieur d’une banque marocaine de 1969 à 2002, il s’est intéressé, après sa retraite, au patrimoine culturel du Melhoun, et entreprit la traduction en français, de plus de 400 Qassidas . Tout récemment il a publié « La musique andalouse-Al Ala- dans la langue de Molière ». Cette traduction des onze Noubas a connu un important succès et a permis aux amateurs de cette musique, comme ceux du Malhoun , d’en savourer davantage leurs sublimes splendeurs.
Fouad Guessous, qui réalise également des caricatures, est aussi l’auteur de plus de 15 ouvrages, romans, traductions, dont « Al Borda », « Al Fiyachia » , « Al Mounfarija » et autres Qassidas mystiques.
Kaddour Fattoumi
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